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Calcul d'un Indice d'intérêt des milieux de chasse pour les chiroptères
Proposition de méthodologie de calcul d'un Indice d'intérêt
des milieux de chasse pour les chiroptères
Lustrat P. (2005) Proposition de méthodologie de calcul d'un Indice d'intérêt des milieux de chasse pour les chiroptères. Rapport Nature Recherche. 6 pages
P. Lustrat
1) Introduction
Le gestionnaire de milieux naturels a parfois besoin de comparer plusieurs sites afin de choisir ceux qui bénéficieront en priorité de mesures de protection, ou celui qui sera le moins perturbé par certains travaux (construction de routes ou d'autoroutes, de voies ferrées, d'éoliennes, etc…).
Dans le cas des chiroptères, les inventaires apportent des éléments importants, mais il est difficile de hiérarchiser les sites sur la base seule des espèces rencontrées, à cause des biais dû aux méthodes d'étude, ainsi qu'aux différences de statut des différentes espèces.
Nous avons tenté de calculer un indice permettant de noter les milieux en fonction de leurs richesses cheiroptologiques.
2) Méthode d'inventaire des chiroptères
L’identification de la plupart des espèces de chiroptères est possible de façon fiable à condition d’analyser les sons enregistrés (Zbinden, 1995). Pour cela, nous avons employé un détecteur de type S-25 (fabricant : Ultra Sound Advice), que nous avons utilisé avec l’analyseur d’ultrasons PUSP (Portable Ultrasound Signal Processor). Les signaux sont enregistrés sur magnétophone à cassettes Sony type walkman professional WM-D6C. Les cassettes utilisées sont de type SA 60 - IEC II de marque TDK.
Pour identifier les espèces, nous avons procédé à une analyse discriminante multivariée telle que celle utilisée par Zingg (1990)en utilisant les variables suivantes : durée du signal, fréquence de début, du milieu, au maximum d’amplitude et de fin du signal, durée des intervalles entre les signaux, bande fréquentielle et rapport de la bande fréquentielle sur la durée du signal, en effectuant la moyenne des signaux enregistrés pour chaque chauve-souris (10 signaux en moyenne).
Les chauves-souris ont été enregistrées le long de transect, parcourant l’ensemble de la zone à étudier.
Nous avons ensuite déterminé le pourcentage de contacts pour chaque espèce.
3) Pondération en fonction du biais méthodologique
Toutes les espèces n'émettent pas des ultrasons avec la même intensité, de plus la hauteur de vol, et donc la distance de localisation varie aussi beaucoup. Ces différences induisent un biais dans le nombre de contacts.
Nous avons donc calculé un indice pondéré par la méthode (IPM) en fonction des possibilités de détection des différentes espèces.
Indice pondéré pour les espèces
Espèces
Distance moyenne de détection
Indice pondéré par la méthode (IPM)
Noctule (toutes espèces) Sérotines (toutes espèces)
Molosse
Plus de 30 m
1
Pipistrelles (toutes espèces)
Minioptère de Schreber
Entre 20 et 30 m
2
Oreillard (toutes espèces)
Myotis (toutes espèces)
Barbastelle
Rhinolophes (toutes espèces)
Moins de 20 m
4
4) Pondération en fonction du statut
Toutes les espèces n'ont pas le même statut et nous avons déterminé un indice pondéré en fonction du statut (IPS) :
Statut
Indice pondéré en fonction du statut (IPS)
Annexe II directive Habitat
2
Statut régional : Menacé ou Très rare
2
En raison de son répartition et de sa colonisation de tous les milieux, la
Pipistrelle commune est affecté d’un IPS de : 0.
5) Calcul de l'indice d'intérêt cheiroptologique (IIC)
L’indice d’intérêt cheiroptologique (IIC) se calcule de la façon suivante :
IIC= (% de contacts X IPM) X IPS
6) Exemples :
Pourcentage de fréquence de contacts
NC
NL
SE
GR MU
MU NA
MU DA
MU m-b
MU BE
PI SO
PI CO
PI K/N
P kuh
OR
Montauger
36,7
8,2
1
16,4
36,7
1
Fontenay
45,8
15,1
3,4
13,4
0,9
21,8
6,7
Sorques
19,5
16,3
8,1
4
1,6
1,6
41,5
6,5
0,9
Fontainebleau
5
11
10
9
3,5
7
1
3,5
43
6
1
Hautil
2,8
0,7
0,7
1,4
93,7
0,7
Port Royal
5,5
1,1
1,1
2,2
2,2
86,8
1,1
Sénart
11,3
1,6
11,3
4,8
1,6
56,5
12,9
Grands Avaux
13
5
9
2
5
1
53
11
1
Malmaison
7,7
1,2
0,3
2,3
1,2
3,1
75
8,9
0,3
Sites
Département
Milieux
Nombre d’espèces
IIC
Montauger
91
Milieux humides
6
112,5
Sorques
77
Milieux humides
9
130,8
Fontenay
91
Milieux humides
7
131,8
Hautil
95
Forêt
6
20,3
Malmaison
92
Forêt
9
40,3
Port Royal
78
Forêt
7
56,1
Sénart
91
Forêt
7
57,9
Grands Avaux
91
Forêt
9
130,0
Fontainebleau
77
Forêt
11
286,0
7) Applications :
En analysant plus finement les différentes critères des forêts de la région parisienne, on peut essayer de comprendre pourquoi certaines sont plus riches que d’autres.
A) On peut par exemple comparer les forêts selon leurs distances de Paris.
On s’aperçoit que plus les forêts sont éloignées de Paris, plus leur IIC augmente, hormis pour la forêt de l’Hautil.
Distance de Paris
Sites
Distance de Paris
IIC
Malmaison
13 km
40,3
Sénart
24 km
57,9
Port Royal
24 km
56,1
Hautil
30 km
20,3
Grands Avaux
40 km
130,0
Fontainebleau
55 km
286,0
B) On peut aussi comparer les forêts selon leurs superficies.
Ce critère ne semble pas influencer l’IIC, hormis pour les forêts de grande superficie comme la forêt de Sénart ou de Fontainebleau, mais la forêt des Grands Avaux, malgré une petite taille présente un IIC très élevé.
Surface des forêts
Sites
Surface
IIC
Grands Avaux
182 ha
130,0
Malmaison
201 ha
40,3
Hautil
400 ha
20,3
Port Royal
720 ha
56,1
Sénart
3 050 ha
57,9
Fontainebleau
17 000 ha
286,0
C) Si l’on utilise ces 2 critères, on s’aperçoit que la proximité de Paris a un effet négatif sur les IIC :
En effet, une forêt telle Malmaison (200 ha) n’a un IIC que de 40,3, alors qu’une autre petite forêt, les Grands Avaux (182 ha) a un IIC de 130.
La différence se trouve dans la distance de la forêt par rapport à Paris : Malmaison se trouve à moins de 30 km de Paris, alors que les Grands Avaux sont à plus de 30 km de la capitale.Les forêts de grande taille sont soumis aux mêmes contraintes : la forêt de Sénart (3050 ha) qui se trouve à moins de 30 km de paris a un IIC de 57,9, alors que la forêt de Fontainebleau (17 000 ha) a un IIC de 286 et se trouve à plus de 30 km de Paris.
7) Conclusion
Le calcul d'un indice d'intérêt cheiroptologique est un outil indispensable pour le gestionnaire de milieux naturels. Cela lui permet de hiérarchiser les sites afin de protéger les plus intéressants. Cela permet aussi de comprendre pourquoi certains sites sont plus intéressants et d’appliquer des règles de gestion plus pertinentes.
En comparant plusieurs sites dans une région, il est possible de déterminer un indice d’intérêt cheiroptologique par milieu (par exemple, forêts, milieux humides) et donc de classer les différents sites en fonction de leurs intérêts cheiroptologiques.
8) Bibliographie
- LUSTRAT P. (1995) Les chauves-souris de la forêt de Fontainebleau.
Service départemental O.N.F. & Conseil Général de Seine et Marne.
Rapport d’étude non publié, NATURE RECHERCHE (55 pp.).
- LUSTRAT P. (1997) Biais dus aux techniques d’étude des chiroptères en
activité de chasse en milieu forestier. ARVICOLA t. IX, n° 1 : 7-10.
- LUSTRAT P. (2001) Les territoires de chasse des chiroptères de la forêt
de Fontainebleau. Le Rhinolophe 15 : 167-173.
- THOMAS D. W. & WEST S. D. (1989) Sampling methods for bats.
Gen. Tech. Rep. PNW-GTR-243. Portland, OR : U.S. Department of
Agriculture, Forest Service, Pacific Northwest Research Station. 20 p.
- ZBINDEN K. (1995) - Bat echolocation, electronics and field research : a
fruitful symbiosis ? Le Rhinolophe 11 : 41-52.
- ZINGG P.E. (1990) - Akustische artidentifikation von fledermäusen
(Mammalia : Chiroptera) in der Scweiz. Revue suisse Zool. 97 (2) : 263-294.
- ZINGG P.E. & R. MAURIZIO (1991) - Die Fledermäuse (Mammalia :
Chiroptera) des Val Bregaglia. Jber. Natf. Ges. Graubünden
106 : 43-88.
Tags : especes, foret, iic, indice, milieux
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Commentaires
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Jean-Marc