Cet article est tiré de mon livre :
Les animaux sauvages de la forêt de Fontainebleau.
Publié aux Editions du Puits Fleuri en 1998.
La forêt de Fontainebleau est un site d’une richesse herpétologique exceptionnelle : 11 espèces de reptiles (plus une espèce de tortue introduite), 100 % des espèces de reptiles présents en Ile-de-France sont présents en forêt de Fontainebleau.
La forêt de Fontainebleau constitue un carrefour biogéographique :
Le climat de la forêt de Fontainebleau appartient au climat régional de l’Ile-de-france, teinté d’influences continentales ou sub-montagnardes, ou parfois méditerranéennes et atlantiques.
Ce qui explique que, pour plusieurs espèces, la forêt de Fontainebleau constitue la limite de leur répartition en France :
La vipère aspic (Vipera aspis) est une espèce para-méditerranéenne centrale, dont l’extension vers le nord de la France est limitée par des facteurs climatiques. La forêt de Fontainebleau constitue à peu près sa limite de répartition septentrionale.
La vipère péliade (Vipera berus) est une espèce nord-eurasiatique et a des exigences thermiques moindres que l’aspic. Hormis le Massif Central et le Jura, l’aire de répartition sud de ce reptile est la région Ile-de-France.
La répartition de ces 2 serpents est strictement complémentaires, et les cas de cohabitation ne dépassent pas, en France, quelques centaines de mètres. En forêt de Fontainebleau, elles cohabitent, mais ne se trouvent pas dans les mêmes milieux : la vipère aspic vit dans des endroits très secs et bien ensoleillés, alors que la vipère bérus fréquente davantage les milieux frais et humides : chênaies ombragées et ptéridaies.
Le Lézard des souches (Lacerta agilis) est une espèce continentale, de climat tempéré et frais, dont l’Ile-de-france constitue sa limite occidentale, alors que le Lézard vert (Lacerta viridis), la Vipère aspic (Vipera aspis), la Couleuvre d’Esculape (Elaphe longissima) et la Couleuvre vipérine (Natrix maura), atteignent en Ile de France leurs limites septentrionales.
Une grande variété de milieux biologiques
La grande diversité des milieux, associé à ces particularités climatologiques, permet la présence d’espèces de reptiles aux exigences écologiques très différentes.
Plusieurs espèces très rares n’ont qu’une seule localisation en forêt de Fontainebleau.
2 espèces de reptiles n’ont qu’une seule localisation à Fontainebleau :
- le lézard vivipare (Lacerta vivipara) qui préfère s’établir dans les biotopes humides, tels les tourbières, les bords de mare, etc.
- la couleuvre vipérine, espèce semi-aquatique qui se nourrit
essentiellement de poissons ; cette espèce semble avoir été introduite (avec succès, puisqu’elle se reproduit) à Fontainebleau, car elle est absente de toute la région environnante.
Pour ces 2 espèces, il est probable que la forêt de Fontainebleau soit trop sèche ; en effet, certains été, une dizaine de mares à peine restent en eau.
L’évolution des populations est étudiée (Lustrat P. 1995 Reptiles et batraciens de la forêt de Fontainebleau.Rapport d’étude pour l’Office National des Forêts)
- 9 espèces dont le statut est resté stable.
- 1 espèce dont l’évolution du statut est inconnue : la coronelle.
- 1 espèce en régression : le lézard vivipare.
Espèces |
Statut |
Evolution |
Causes |
Tortue Floride |
Commune |
ì |
lâchers illégaux |
Orvet |
Commun |
= |
|
Lézard souches |
Assez Commun |
= |
|
Lézard vert |
Commun |
= |
|
Lézard vivipare |
Exceptionnel |
manque de données |
|
Lézard murailles |
Commun |
= |
|
Couleuvre collier |
Commune |
= |
|
Couleuvre vipérine |
Exceptionnelle |
= |
Introduite |
Couleuvre Esculape |
Commune |
= |
|
Coronelle |
Rare |
? |
manque de données |
Vipère aspic |
Commune |
= |
|
Vipère bérus |
Rare |
= |
manque de biotope |
Légende : E : exceptionnel
R : rare
AC : assez commun
C : commun
D : disparue
= : stable
ì : en progression
î : en régression
? : inconnu
L’ORVET (Anguis fragilis)
Cette espèce est commune en forêt de Fontainebleau. L’orvet se cache dans les tas de bois, sous les souches ou sous les pierres.Il fréquente les endroits ensoleillés humides, bords de fossés, broussailles, etc...
Notons l’observation d’une femelle donnant naissance à 22 jeunes, ce qui est exceptionnel, le nombre de jeunes est généralement de 6 à 19, exceptionnellement 24.
L’orvet n’est pas une espèce menacée actuellement, cependant l’emploi des insecticides et de divers pesticides (produits anti limaces en particulier) réduisent ses possibilités d’alimentation.
LE LEZARD DES SOUCHES OU AGILE
(Lacerta agilis)
C’est une espèce continentale dont l’Ile-de-france constitue à peu près sa limite occidentale. A Fontainebleau où il est commun, on le trouve sur les bords des chemins et les lisières de forêt.
Cette espèce n’est pas menacée actuellement, cependant, les populations périphériques doivent faire l’objet d’une attention particulière.
LE LEZARD VERT (Lacerta viridis)
L’Ile de France constitue pour cette espèce la limite septentrionale de répartition.En forêt de Fontainebleau où il est commun, on le trouve aisément sur les bords de chemins, dans les landes à bruyères, etc...
Il est malheureusement souvent capturé par des touristes ou par des naturalistes peu scrupuleux pour l’élever en terrarium.
LE LEZARD VIVIPARE (Lacerta vivipara)
Ce lézard préfère s’établir dans des biotopes humides, tels que tourbières, lisières et clairières de forêts humides. A Fontainebleau, le lézard vivipare est très rare. Il n’existe que dans une seule station, dans le sud de la forêt.
Le maintien de zones humides en forêt est la condition sine qua non pour que ce lézard se maintienne en forêt de Fontainebleau.
LE LEZARD DES MURAILLES (Podarcis muralis)
Le lézard des murailles est une espèce très commune en forêt de Fontainebleau.
Il est présent dans tous les milieux bien ensoleillés, les pierriers, rochers, etc...
LA COULEUVRE A COLLIER (Natrix natrix)
La présence de cette espèce est liée à celle des amphibiens sont elle se nourrit habituellement, bien qu’on puisse la trouver loin de l’eau car elle peut se nourrir occasionnellement de micro-mammifères.
A Fontainebleau, c’est une espèce commune présente autour de la majorité des plans d’eau de la forêt. Plusieurs observations ont été faites dans des endroits secs, loin de tous points d’eau.
LA COULEUVRE VIPERINE (Natrix maura)
C’est une espèce semi-aquatique qui se rencontre principalement autour des rivières, des mares ou des étangs. La forêt de Fontainebleau constitue la limite septentrionale de la répartition de ce serpent en France.
Elle est d’ailleurs très rare et présente seulement dans deux mares de cette forêt . La reproduction est régulière dans une des deux mares car j’ai pu observer un jeune individu en, 1994.
Dans l’autre mare, elle n’a pas été revue depuis une dizaine d’années, et semble avoir disparue.
La couleuvre vipérine a probablement été introduite en forêt de Fontainebleau, car elle est absente des milieux aquatiques autour de ce massif forestier.
LA COULEUVRE D’ESCULAPE (Elaphe longissima)
Cette espèce à tendance arboricole, fréquente les milieux rocheux, les bois et leurs lisières, à condition qu’ils aient un minimum d’ensoleillement.
En forêt de Fontainebleau, la couleuvre d’Esculape atteint sa limite septentrionale de répartition.
C’est une des espèces de serpents les plus communs dans la zone étudiée, et il est possible de la rencontrer dans tous les milieux sauf ceux complètement fermés (futaie).
LA CORONELLE LISSE (Coronella austriaca)
C’est une espèce de lisières ensoleillées, qui a une distribution locale liée à la présence des lézards qui constituent l’essentiel de sa nourriture.
A Fontainebleau, c’est une espèce qui semble rare, cependant la discrétion de ses moeurs rende sa découverte difficile.
Sa ressemblance superficielle avec une vipère explique qu’elle soie encore souvent détruite.
LA VIPERE ASPIC (Vipera aspis)
La vipère aspic vit dans des milieux très variés à condition qu’elle dispose d’un bon ensoleillement et d’un couvert végétal lui permettant de se cacher.
La forêt de Fontainebleau constitue à peu près sa limite septentrionale de répartition.
Elle est commune dans les zones rocheuses, les landes et les lisières, mais elle souffre des destructions directes effectués par les promeneurs.
LA VIPERE BERUS OU PELIADE (Vipera berus)
La vipère bérus fréquente davantage les milieux humides et moins les biotopes secs que la vipère aspic.
La forêt de Fontainebleau constitue à peu près sa limite sud de répartition, hormis la présence d’une population dans le Massif Central.
A Fontainebleau, elle est plus rare que l’aspic ; on la trouve dans les endroits frais et humides : chênaies ombragées, ptéridaies.
Le maintien des zones humides en forêt est nécessaire pour la survie de cette espèce.